Pacemaker: stimulateur cardiaque
Le premier stimulateur cardiaque a été implanté chez l’homme en 1958. Des sondes endocavitaires apparaissent dans le courant des années 60, c’est-à-dire implantées dans les cavités cardiaques en passant par les veines et sans nécessité d’une chirurgie thoracique pour les positionner à la surface du cœur. En 1972 est implanté le premier stimulateur à combustible atomique, cette énergie ayant été abandonnée au début des années 80.
Le boitier
Le boîtier, dont le diamètre moyen est d’environ 4 cm, se compose d’une coque en titane contenant une batterie et un microcircuit avec un logiciel, et d’un connecteur. Sa taille a été considérablement réduite ces dernières années, et reste principalement limitée par celle de la batterie. Celle-ci est en lithium avec une durée de vie de 5 à plus de 10 ans. Elle n’est pas rechargeable et le stimulateur est donc remplacé avant l’épuisement de sa batterie lors d’une opération généralement très simple.
Différentes fonctions sont présentes ou non selon le modèle de stimulateur, telles que :
– Capteur d’activité physique permettant de déceler les efforts et d’accélérer le cœur en réponse (asservissement à l’effort), soit par mesure des mouvements (capteur piézoélectrique), soit par mesure de la fréquence respiratoire (mesures d’impédance thoracique), soit par mesure de la contractilité cardiaque
– Emetteur/récepteur à distance pour établir une connexion avec un boitier externe, au domicile du patient (télésuivi, téléconsultation)
– Désormais systématiquement présentes, des mémoires de tracés du rythme cardiaque enregistrant toute anomalie telles que des arythmies survenues entre deux consultations
– Options de réglage diverses selon le type de pathologie à traiter.
Les sondes
Le boitier est relié au cœur par l’intermédiaire d’une ou plusieurs sondes souples et fines. Ces sondes sont des conducteurs électriques.
Le conducteur interne est en alliage comprenant titane, iridium, carbone ; l’isolant est en silicone, polyuréthane ou un mélange des deux (cf. fig.1). Celles-ci sont fixées à l’endocarde par une vis, plus rarement par un système de barbillons entourant l’extrémité distale de la sonde. Le nombre de sonde dépend de la nature et des troubles motivant l’implantation. Une sonde est presque toujours implantée à l’apex ou sur le septum du ventricule droit, une 2e est fréquemment connectée à l’oreillette droite (excepté si le patient est en arythmie), une 3e est plus rarement introduite dans le réseau veineux coronaire pour piloter le ventricule gauche en le synchronisant avec le ventricule droit. Toutes ces sondes sont placées par voie endocavitaire percutanée via la veine cave supérieure, sauf en cas d’approche chirurgicale épicardique.
Pourquoi pose-t-on un stimulateur cardiaque ?
Le stimulateur cardiaque sert à déclencher, commander les battements cardiaques. Il lutte donc contre la bradycardie, c’est-à-dire le ralentissement excessif de la fréquence cardiaque. Il est prescrit dans les défaillances des voies de conductions électriques naturelles du cœur, en particulier lorsque celles-ci ne permettent plus d’obtenir des contractions à fréquence normale.
Les stimulateurs classiques comportent une ou deux sondes, qui servent à stimuler et/ou détecter l’activité de l’oreillette droite et/ou du ventricule droit. Ainsi, lorsque la commande des battements, qui se trouve dans l’oreillette (nœud sinusal) est en cause, c’est l’oreillette que le pacemaker va stimuler. En revanche, comme souvent, si c’est la connexion entre oreillettes et ventricules (nœud atrio-ventriculaire et faisceau de His) qui fait défaut, il va servir de relai entre la commande de l’oreillette qui sera détectée, et le ventricule qu’il va stimuler.
Dans l’insuffisance cardiaque, il existe depuis environ 15 ans une technique adaptée à certains cas, pour améliorer l’efficacité du ventricule gauche par resynchronisation. Apportant des résultats spectaculaires lorsque l’indication est bien posée, ce type de stimulateur comporte 3 sondes : une pour l’oreillette droite et 2 pour les ventricules droit et gauche, de façon à rendre simultanée la contraction des parois du cœur qui sont asynchrones. Notons que cette technique est également possible avec un défibrillateur (voir ce chapitre).
Quand faire l’intervention ?
Les ralentissements du cœur, parfois permanents et parfois sporadiques, peuvent entraîner des symptômes tels que la syncope (avec risque de chute traumatisante), l’essoufflement ou la simple fatigue. Certains troubles de la conduction électrique peuvent même aboutir à un arrêt cardiaque avec risque de mort subite.
Un stimulateur est prescrit dès lors que les ralentissements de cœur sont déjà ou peuvent devenir symptomatiques. Dans certains cas il n’y a pas encore eu de bradycardie, mais des signes électrocardiographiques font craindre cette évolution et proposer un pacemaker.
L’intervention en pratique
L’hospitalisation
Le séjour hospitalier pour l’intervention dure généralement entre 2 et 4 jours.
Certaines équipes réalisent l’intervention lors d’une hospitalisation ambulatoire.
L’anesthésie, la douleur
La douleur est en principe suffisamment légère pour que l’opération soit réalisée sous anesthésie locale et légère sédation. Une anesthésie générale peut être envisagée en fonction du contexte de chaque patient.
L’abord vasculaire, l’accès au cœur
Pour implanter les sondes, un accès au réseau veineux est donc nécessaire, permettant l’arrivée dans l’oreillette droite, qui est le vestibule cardiaque au sang veineux avant qu’il ne soit dirigé, par le ventricule droit, aux poumons pour sa réoxygénation.
Une incision d’environ 4 cm est réalisée sous la clavicule, à l’épaule (droite ou gauche indifféremment, et donc en fonction des préférences de l’opérateur et du patient), où deux veines sont utilisables :
– la veine céphalique que l’on peut dénuder et inciser entre les muscles de l’épaule (pectoral et deltoïde)
– la veine sous-clavière, que l’on ponctionne derrière la clavicule
Les sondes sont positionnées sous vision radioscopique grâce à un appareil de radiographie adapté. Une fois fixée dans le cœur à l’endroit escompté, leur bon fonctionnement électrique, signant un bon contact, est vérifié au bloc grâce à un analyseur muni d’un câble stérile.
Elles sont ensuite connectées au stimulateur, et celui-ci est introduit dans une poche (loge) sous-cutanée ou sous-musculaire selon les patients, dans la région sous-claviculaire.
Durée de l’intervention
Variable entre les patients en fonction de données anatomiques, l’intervention peut être rapide, de l’ordre de 30 minutes, mais aussi atteindre plus rarement 1 à 2 heures.
Dans le cas des stimulateurs triples pour resynchronisation, cette durée peut être de 30 à 45 minutes dans les cas simples, mais aussi atteindre jusqu’à parfois 3 heures.
Les suites postopératoires
Surveillance
La sortie de l’hôpital peut généralement avoir lieu le lendemain de la procédure, après un électrocardiogramme, une vérification de la cicatrice et une radiographie thoracique montrant la position des sondes. Le bon fonctionnement est également vérifié, cette fois-ci par communication télémétrique avec le stimulateur, au lit du patient.
Les risques de complication
Le taux de complications est faible, de l’ordre de moins de 5 %. Ces complications sont d’autant plus rares qu’elles sont graves. Les plus fréquentes sont de gestion simple, telles que :
– le pneumothorax : décollement du poumon lors de la ponction sous-clavière, qui nécessite parfois une évacuation d’air jusqu’au retour du poumon à la paroi thoracique
– l’hématome de loge : poche de sang par saignement interne, souvent très limité et simplement surveillé jusqu’à résorption
– le déplacement de l’une des sondes dans les premiers jours, nécessitant une reprise pour repositionnement
– une infection précoce du site opératoire, qui oblige au retrait de tout le matériel pour une réimplantation après quelques jours d’antibiotiques
Très exceptionnellement, des complications vasculaires graves telles qu’un hématome thoracique (pleural ou médiastinal) ou une tamponnade peuvent survenir.
Quels résultats ?
Le fonctionnement d’un stimulateur est extrêmement fiable et précis, avec de rares anomalies matérielles. Son efficacité pour éviter les symptômes que l’on souhaite traiter est donc pratiquement systématique. Les cas où le résultat serait décevant, tel que la persistance d’un essoufflement ou d’une fatigue, ou encore de malaises, sont généralement le signe que ces symptômes n’étaient pas liés à la bradycardie mais à d’autres phénomènes.
Après l’implantation
Les premiers jours
Juste après l’implantation du pacemaker, il est important de surveiller la cicatrice et d’informer son médecin en cas de rougeur, de gonflement ou de suintement.
Durant les premières 24 heures, tout mouvement brusque de l’épaule est à éviter, mais il est préférable de ne pas non plus raidir son épaule afin d’éviter une ankylose. Des mouvements doux pour reprendre la mobilité sont donc recommandés.
Pendant le premier mois, il faut éviter le port d’objets lourds et l’activité physique intense.
Il est en dehors de cela tout à fait possible de reprendre rapidement une vie normale.
Le suivi
Après la pose, un carnet de porteur de pacemaker est remis, indiquant des informations sur le dispositif implanté. Il doit autant que possible être conservé en permanence sur soi.
Un suivi spécialisé est instauré pour vérifier le bon fonctionnement de l’appareil, recueillir ses mémoires et surveiller l’usure de la batterie. Ce suivi comporte des contrôles télémétriques réguliers (par l’ordinateur dédié au pacemaker) généralement dans le centre où l‘appareil a été implanté. Un premier contrôle est effectué 4 à 8 semaines après la pose. Ensuite, les consultations sont prévues tous les 6 à 12 mois.
Le jour du changement
L’avancement de l’usure de la batterie est surveillé de près lors des contrôles réguliers. Avant l’épuisement de la batterie, des indices d’usure sont observés et le changement est programmé autant que possible sans urgence. Il est donc important de ne pas négliger le suivi.
L’intervention consiste généralement en une incision en regard du boitier, qui est retiré et remplacé par un neuf. Parfois, des gestes sur les sondes sont nécessaires si celles-ci posaient des problèmes de fonctionnement.
La vie avec le stimulateur
La présence du stimulateur doit être le plus possible oubliée, tant elle a peu de conséquences dans la vie de tous les jours.
Quelles sont les précautions à prendre ?
A la maison
– Le téléphone : qu’il soit filaire ou sans fil domestique, il ne pose aucun problème. Pour les portables cellulaires, une possible interférence des ondes est prise en compte et l’on recommande une utilisation à l’oreille opposée au côté du stimulateur ; le port du téléphone ne doit pas se faire non plus dans une poche proche du dispositif.
– A la cuisine : le four à micro-ondes, les plaques de cuisson électriques ou les robots de cuisine ne posent aucun problème. Seules les plaques de cuisson à induction génèrent un faible champ magnétique, pour lequel il est recommandé de garder une certaine distance ; leur utilisation, pour les mettre en marche par exemple, reste possible.
– Pour le bricolage : les perceuses ou autres scies électriques sont sans danger ; la soudure à l’arc créant un champ électromagnétique, elle est en théorie contre-indiquée, mais peut s’envisager sous réserve de certaines précautions.
Les magasins, les voyages
– Les portiques antivol des magasins ou des bibliothèques peuvent être traversés sans problème. Il est toutefois recommandé de ne pas s’y arrêter.
– Les voyages ne sont bien évidemment pas contre-indiqués. Pour l’avion, les portiques d’aéroport pourraient théoriquement être traversés, mais sont interdits pour des raisons de responsabilités et de principe de précaution. En revanche, les détecteurs manuels plus puissants sont à éviter, ce qui justifie de bien avoir sur soi sa carte de porteur de pacemaker.
– Le pacemaker ne contre indique pas la conduite automobile ni le port de la ceinture de sécurité.
Le sport
– Le pacemaker ne limite pas les activités sportives en dehors d’éviter la pratique intensive du golf ; pour les sports de raquette, on préférera si possible une implantation du côté opposé à la main tenant la raquette.
– Il faut éviter de se suspendre (par exemple à une barre) en extension des bras car cela peut étirer les sondes.
– La chasse au fusil impose une implantation du côté opposé à l’épaule qui arme, de façon à éviter la force de recul du fusil sur le boitier.
Au travail
– Certains postes à proximité de moteurs à électro-aimants par exemple, doivent faire l’objet de mesures de champ magnétique par des entreprises spécialisées.
– Le port d’un stimulateur est par ailleurs compatible avec la plupart des métiers.
A l’hôpital
Il est là aussi nécessaire d’avoir sa carte de pace maker sur soi et de la montrer aux professionnels de santé.
– La chirurgie : l’utilisation d’un bistouri électrique dans la plupart des opérations impose certaines précautions telles que des réglages préopératoires du stimulateur et une limitation dans l’intensité de ce bistouri ; un contrôle postopératoire est également préconisé.
– L’imagerie médicale : les radiographies classiques, le scanner (tomodensitométrie) ne posent aucun problème ; en revanche, L’IRM (imagerie par résonnance magnétique) générant un très puissant champ magnétique, ne doit être réalisée que dans des centres spécialisés en accord entre cardiologues et radiologues, avec des précautions très précises.
– La radiothérapie : elle est potentiellement nocive pour le dispositif, mais avec un faible taux d’accidents ; des contrôles réguliers et des réglages spécifiques sont réalisés pendant les périodes de cure.