Ce muscle qu’est le cœur est donc heureusement doté de sa propre commande, ce qui nous évite de devoir songer en permanence à le faire battre !

Comprendre à l’extérieur ce qu’il se passe à l’intérieur

L’analyse de notre rythme, normal ou anormal passe par l’enregistrement de ces phénomènes électriques transmis du cœur en surface, sur la poitrine et recueillis sur l’électrocardiogramme (ECG). En effet, le système électrique cardiaque est tellement petit qu’il est invisible sur les examens d’imagerie, même aussi performant que l’échographie, le scanner ou l’IRM.

Naissance de l’influx dans les oreillettes

Il nait dans le nœud sinusal (ou nœud de Keith et Flack) dans la partie haute de l’oreillette droite. Cette naissance est le fait d’un automatisme : les cellules du nœud sinusal sont localement capables de créer les courants ioniques à travers leurs membranes, nécessaires à déclencher un potentiel d’action qui se transmet de cellule en cellule. Cet automatisme est très original car les autres cellules cardiaques n’en sont pas capables, les condamnant à obéir à cette seule source d’activation.

Après sa naissance dans le nœud sinusal, l’influx se propage à l’ensemble des oreillettes pour commander leur contraction, qui se manifeste sur l’électrocardiogramme par l’onde P, caractéristique du rythme sinusal (normal).

Une source qui s’adapte aux besoins

De nombreux paramètres intérieurs ou extérieurs vont agir sur le nœud sinusal pour accélérer (effort, émotion…) ou ralentir (repos, sommeil…) cet automatisme sur une gramme de fréquence allant de 40 à 180 battements par minute chez l’adulte.

Certaines maladies du rythme, comme la fibrillation ou le flutter correspondent à l’émergence de foyers d’activation anormaux, rapides et anarchiques dans les oreillettes qui inhibent l’action du nœud sinusal dont l’automatisme est beaucoup plus lent que ceux de ces arythmies. A l’inverse, le nœud sinusal peut présenter des ralentissements excessifs, voire des pauses ou une panne totale d’activité pouvant nécessiter l’implantation d’un stimulateur cardiaque.

Propagation de l’influx à travers la jonction oreillettes-ventricules

Il n’y a pas de passage direct de l’influx à la jonction entre oreillettes et ventricules, car les anneaux fibreux qui entourent les valves atrio-ventriculaires (valves tricuspide et mitrale) sont isolants, obligeant l’influx des oreillettes à converger vers un relai électrique unique, le nœud atrio-ventriculaire (ou nœud d’Ashoff-Tawara). A ce niveau, l’activation est légèrement ralentie (pendant environ 0,15 sec) pour laisser du temps à l’éjection des oreillettes et donc optimiser la synchronisation de contraction oreillettes-ventricules. Sur l’électrocardiogramme, on note effectivement un temps de repos entre l’onde P (contraction des oreillettes) et l’onde R (contraction des ventricules).

L’autre intérêt de cette temporisation dans le nœud atrio-ventriculaire est d’éviter qu’un emballement des oreillettes(une fibrillation provoque une activation des oreillettes à une fréquence de 250 à 400 par minute !) induise un emballement identique des ventricules. En effet, une fréquence ventriculaire supérieure à 250 / minute est très mal tolérée (malaise, perte de connaissance), voire mortelle en cas de fréquence extrême prolongée.

Parmi les maladies du rythme situées à ce niveau, on citera les blocages et ralentissements du nœud atrio-ventriculaire, appelés blocs atrio-ventriculaires, cause fréquente de pose d’un stimulateur. Au chapitre des accélérations, on parle de tachycardie jonctionnelle pour les courts-circuits se propageant à ce niveau.

Propagation de l’influx dans les ventricules

Au sortir du nœud atrio-ventriculaire, l’influx reprend de la vitesse (4 m/sec) pour parcourir, dans la cloison entre les deux ventricules, le faisceau de His, puis ses branches droite et gauche destinées à chacun des deux ventricules.

Ce réseau macroscopique, tel un nerf de quelques millimètres visible à l’œil nu sur un cœur disséqué, est complété par un réseau très fin de fibres de Purkinje, qui aident l’influx à atteindre rapidement toutes les fibres musculaires ventriculaires et générer une contraction homogène de tout le muscle (onde R sur l’électrocardiogramme).

Comme aux étages supérieurs, la conduction peut être altérée à ce niveau, au risque de provoquer des pauses ou des ralentissements du rythme (blocage dans le faisceau de His) mais aussi une désynchronisation des deux ventricules(bloc d’une des branches) dont la contraction globale devient moins performante. A l’inverse, le muscle des ventriculespeut devenir anormalement actif au plan électrique et produire des emballements dangereux, appelés tachycardie etfibrillation ventriculaire. Le plus souvent, ces foyers électriques anormaux apparaissent à l’occasion d’une maladie du muscle cardiaque, dans les suites d’un infarctus par exemple.